Désemparées face aux réseaux sociaux, les directions marketing doivent se réinventer, pour se réapproprier leur marque
Durant cinq décennies, les directions marketing ont matraqué les ménagères de moins de 50 ans en utilisant tout l'arsenal dont elles disposaient. Et il s'agissait plutôt de gros calibres.
Puis un jour, la ménagère de moins de 50 ans s'est mise à parler, à donner son avis, à critiquer. Et là tout l'édifice s'est écroulé. Les canons des communicants sont devenus muets face à cette petite ménagère à grande gueule.
Longtemps dédaignés par les pros du marketing, qui les considéraient à tort comme des médias de second plan, les réseaux sociaux ont totalement modifié la donne. D'une relation mono-directionnelle, nous voici aujourd'hui arrivé à une relation multidirectionnelle, où l'information n'est plus distillée uniquement par le propriétaire de la marque, mais où chaque utilisateur a son mot à dire sur "sa" marque.
La marque : c'est bien là tout l'enjeu. Je compare cette situation à une guerre de flibustiers.
Avant, dans les temps anciens, la marque était un bon gros gallion que les rois d'Espagne envoyaient à travers l'océan découvrir de nouvelles contrées et ramener autant de richesses que possible.
Les menaces se résumaient essentiellement à quelques tempêtes tropicales, ou à un risque d'abordage hostile par l'équipage d'un autre gros gallion. Autant dire peu de choses, parfaitement étudiées et préparées par les officiers.
Et puis le jour où la tribu des ménagères de moins de 50 ans s'est mise en tête de donner son avis, des nuées de pirates sont spontanément apparues dans tous les recoins de l'océan. Les escarmouches se sont multipliées, et les rois d'Espagne ont commencé à perdre le contrôle de leurs gros gallions, et à voir leurs routes maritimes se transformer en dangereux coupe-gorges. Sans compter qu'au milieu des pirates se cachaient quelques corsaires à la solde de l'ennemi...
Qu'on fait les rois d'Espagne ? Piqués au vif par la perte de leurs précieuses marques, ils ont décidé de sortir l'artillerie lourde, en armant chaque gallion de centaines de canons. Sauf que cela n'a servi à rien : que peuvent des canons face à des nuées d'embarcations rapides qui donnent l'assaut simultanément ?
Bon j'arrête avec mes histoires de pirates. Mais l'idée est là.
Récemment, une marque de restauration rapide a été attaquée sur YouTube par des vidéos montrant des conditions d'hygiène douteuse dans certains de ses restaurants. Quelle a été sa réaction face au "buzz" ? Une campagne de spots TV avec des témoignages de salariés qui expliquent les règles drastiques auxquels ils sont soumis. Témoignages dont on sait, par le format, qu'ils sont mis en scène. La marque a donc réagi "à l'ancienne", en déplaçant le champ de bataille vers un terrain qu'elle maîtrisait mieux, mais en commettant deux erreurs stratégiques : répondre à du "vrai" par de la mise en scène, donc potentiellement du "fake", et surtout, abandonner le terrain des réseaux sociaux aux internautes.
Cet abandon n'est pourtant pas une fatalité.
Face à des menaces diffuses, qui portent sur tous les aspects de la marque, qu'ils soient sociaux, environnementaux, technologiques ou commerciaux, une réponse globale s'impose.
Les directions marketing sont encore trop fragmentées et cloisonnées par business units ou par sous-marque. Elles doivent aujourd'hui entamer une restructuration profonde et se rapprocher des directions générales pour pouvoir intervenir sur toutes les facettes de la marque.
Et surtout, sur l'ensemble des terrains sur lesquels elle est présente.
Pour reprendre mon imagerie guerrière, ce qui manque aujourd'hui, c'est un véritable état-major intégré, en lieu et place de commandements isolés.
Pour y arriver, que faut-il mettre en place ?
Personnellement, je vois deux chantiers que les directions marketing devraient mettre en oeuvre sans tarder.
Quand j'étais à la fac, on ne jurait que par le "média / hors média". C'était le grand truc, sachant que le "média" constituait le Graal de tout étudiant en marketing.
Aujourd'hui, ces cloisonnements ont volé en éclat. Il n'y a pas de canaux nobles ni de sous-canaux. L'environnement dans lequel évolue la marque est un Tout, constitué de myriades d'entités interconnectées.
Pour conclure, je vais en revenir à mes pirates. Plutôt que d'armer lourdement vos gallions, au risque de ralentir leur progression, mettez sur pieds sur armada de commandos légers, dont la mission va consister à prendre le contrôle simultanément de tous les repères de pirates. Une fois que cela sera fait, vos gallions pourront avancer en toute sécurité, les commandos leur ayant ouvert la voie. Et de surcroît, vos disposerez d'avant-postes avec des vigies chargées de scruter l'horizon en permanence...
Bon allez, je file, je vais remettre mon tricorne...
PS : je vous invite à lire cet excellent article de e-marketing "Les directeurs marketing anticipent une mutation radicale de leur métier"
Puis un jour, la ménagère de moins de 50 ans s'est mise à parler, à donner son avis, à critiquer. Et là tout l'édifice s'est écroulé. Les canons des communicants sont devenus muets face à cette petite ménagère à grande gueule.
Longtemps dédaignés par les pros du marketing, qui les considéraient à tort comme des médias de second plan, les réseaux sociaux ont totalement modifié la donne. D'une relation mono-directionnelle, nous voici aujourd'hui arrivé à une relation multidirectionnelle, où l'information n'est plus distillée uniquement par le propriétaire de la marque, mais où chaque utilisateur a son mot à dire sur "sa" marque.
La marque : c'est bien là tout l'enjeu. Je compare cette situation à une guerre de flibustiers.
Avant, dans les temps anciens, la marque était un bon gros gallion que les rois d'Espagne envoyaient à travers l'océan découvrir de nouvelles contrées et ramener autant de richesses que possible.
Les menaces se résumaient essentiellement à quelques tempêtes tropicales, ou à un risque d'abordage hostile par l'équipage d'un autre gros gallion. Autant dire peu de choses, parfaitement étudiées et préparées par les officiers.
Et puis le jour où la tribu des ménagères de moins de 50 ans s'est mise en tête de donner son avis, des nuées de pirates sont spontanément apparues dans tous les recoins de l'océan. Les escarmouches se sont multipliées, et les rois d'Espagne ont commencé à perdre le contrôle de leurs gros gallions, et à voir leurs routes maritimes se transformer en dangereux coupe-gorges. Sans compter qu'au milieu des pirates se cachaient quelques corsaires à la solde de l'ennemi...
Qu'on fait les rois d'Espagne ? Piqués au vif par la perte de leurs précieuses marques, ils ont décidé de sortir l'artillerie lourde, en armant chaque gallion de centaines de canons. Sauf que cela n'a servi à rien : que peuvent des canons face à des nuées d'embarcations rapides qui donnent l'assaut simultanément ?
Bon j'arrête avec mes histoires de pirates. Mais l'idée est là.
Récemment, une marque de restauration rapide a été attaquée sur YouTube par des vidéos montrant des conditions d'hygiène douteuse dans certains de ses restaurants. Quelle a été sa réaction face au "buzz" ? Une campagne de spots TV avec des témoignages de salariés qui expliquent les règles drastiques auxquels ils sont soumis. Témoignages dont on sait, par le format, qu'ils sont mis en scène. La marque a donc réagi "à l'ancienne", en déplaçant le champ de bataille vers un terrain qu'elle maîtrisait mieux, mais en commettant deux erreurs stratégiques : répondre à du "vrai" par de la mise en scène, donc potentiellement du "fake", et surtout, abandonner le terrain des réseaux sociaux aux internautes.
Cet abandon n'est pourtant pas une fatalité.
Face à des menaces diffuses, qui portent sur tous les aspects de la marque, qu'ils soient sociaux, environnementaux, technologiques ou commerciaux, une réponse globale s'impose.
Les directions marketing sont encore trop fragmentées et cloisonnées par business units ou par sous-marque. Elles doivent aujourd'hui entamer une restructuration profonde et se rapprocher des directions générales pour pouvoir intervenir sur toutes les facettes de la marque.
Et surtout, sur l'ensemble des terrains sur lesquels elle est présente.
Pour reprendre mon imagerie guerrière, ce qui manque aujourd'hui, c'est un véritable état-major intégré, en lieu et place de commandements isolés.
Pour y arriver, que faut-il mettre en place ?
Personnellement, je vois deux chantiers que les directions marketing devraient mettre en oeuvre sans tarder.
- entamer une révolution culturelle, en revoyant intégralement leurs modes de fonctionnement et leur organisation sur la base des principes de la CMI
- intégrer des outils métiers qui vont les aider à reprendre la maîtrise de leur marque, en démultipliant leur puissance de feu : les financiers ont leur ERP, les commerciaux leur CRM, mais les communicants n'ont pas d'outil dédié à leur métier. Cela est en train de changer, grâce notamment aux solutions de Marketing Asset Management et de Brand Management. Des systèmes performants et intégrés, qui facilitent l'automatisation des processes de production et qui offrent une réactivité accrue grâce à une centralisation des contenus, une collaboration facilitée et un contrôle plus facile de l'utilisation de la marque à tous les échelons.
Quand j'étais à la fac, on ne jurait que par le "média / hors média". C'était le grand truc, sachant que le "média" constituait le Graal de tout étudiant en marketing.
Aujourd'hui, ces cloisonnements ont volé en éclat. Il n'y a pas de canaux nobles ni de sous-canaux. L'environnement dans lequel évolue la marque est un Tout, constitué de myriades d'entités interconnectées.
Pour conclure, je vais en revenir à mes pirates. Plutôt que d'armer lourdement vos gallions, au risque de ralentir leur progression, mettez sur pieds sur armada de commandos légers, dont la mission va consister à prendre le contrôle simultanément de tous les repères de pirates. Une fois que cela sera fait, vos gallions pourront avancer en toute sécurité, les commandos leur ayant ouvert la voie. Et de surcroît, vos disposerez d'avant-postes avec des vigies chargées de scruter l'horizon en permanence...
Bon allez, je file, je vais remettre mon tricorne...
PS : je vous invite à lire cet excellent article de e-marketing "Les directeurs marketing anticipent une mutation radicale de leur métier"