Interview de Rafael Mari, Realisaprint.com : "Le marché des revendeurs est ultra exigeant "
Rafael Mari, co-dirigeant de Realisaprint.com |
Bonjour Rafael, tout d’abord merci d’accepter de répondre à quelques questions sur ta vision du marché de l’imprimerie en ligne en 2020.
Ludovic : En 2019, les grands majors de l’imprimerie en ligne comme Cimpress ou Cewe ont vu leur croissance fortement ralentir dans l’imprimerie commerciale, en raison notamment d’une baisse des prix. En même temps, des acteurs plus petits ont connu une forte croissance sur la même période, comme Realisaprint.com, avec pour certains, des levées de fonds particulièrement remarquées. Penses-tu que cette dynamique continuera en 2020 ?
Rafael : Nous avons en effet connu une très belle évolution en 2019 en augmentant de 52% le nombre de commandes. Les clients sont de plus en plus pressés et demandent un service de plus en plus qualitatif malgré l'interface Web. À mes yeux les leaders actuels manquent cruellement d'agilité. Il y a une vraie carte à jouer ! Le fait d'être une structure de taille moyenne (65 salariés) nous permet de proposer un service différent. En résumé, plus que jamais les clients cherchent la réactivité, l’accompagnement, et le savoir-faire des plus petites structures.
Ludovic : Le panorama du web-to-print est en train de changer en Europe, avec l’apparition de places de marché et de comparateurs de prix. Penses-tu que prochainement, les grandes places de marché comme Amazon, Alibaba ou Google puissent proposer des produits imprimés, comme cela s’est produit dans d’autres secteurs ?
Rafael : Il est certain selon moi que les grandes places de marché vont se positionner sur le web-to-print. Cette apparition se fera sur des produits simples (album photo, carte de visite…) par exemple, de nombreux livres sont déjà imprimés à la demande via ces plateformes sans être présentés à l'utilisateur final comme de l'imprimerie en ligne. L'apparition de ce marché sur les marketplaces tarde à arriver car le marché de l'imprimerie ne présente pas des courbes de croissance exceptionnelles au premier abord et n'est donc pas "sexy" pour les investisseurs. Je doute fortement que les marketplaces réussissent à s'imposer sur des produits plus complexes. Je pense en effet que chaque client a besoin d'être conseillé et d'être en contact direct avec l'imprimeur. Chez Realisaprint.com, nous avons donc mis en place une grosse stratégie d'internalisation en investissant plus de 3 millions € en matériels de production depuis 2018. Grâce à cette stratégie, nous maitrisons la qualité de nos produits. Le client le ressent directement grâce à un suivi en temps réel.
Ludovic : En 2020, penses-tu que la demande croissante de produits Eco-responsables conduisent les acheteurs à privilégier des imprimeurs en circuits courts ?
Rafael : 2020 est, selon les études, l'année de l'achat "Eco-responsable". Nous avons pour cela développé chez Realisaprint.com une gamme complète de produits recyclés. De plus la totalité de nos papiers (prospectus, carte de visite, affiches, dépliants...) est produit sur du papier certifié PEFC/FSC respectueux de l'environnement. Je ne pense pas que le marché du Web-to-print soit impacté par le "circuit court" (achat en local), il s'agit de deux marchés parallèles. Nous remarquons cependant une vraie effervescence pour le "made in France" et pour la fabrication en interne. Etonnés de nos prix défiant toute concurrence, nos clients sont rassurés de voir nos unités de production en France. Sans intermédiaire, nous maitrisons la chaine graphique de A à Z. Nous aimons sensibiliser nos clients au "made in France". Il est certain qu’un client préférera acheter en France à prix équivalent (et souvent même moins cher 😊) plutôt qu'à l'étranger. Par exemple, nous avons en 2019 augmenté de 320% notre volume d'offset en se positionnant justement moins cher que les grands majors européens. Une commande passée chez nous plutôt que chez un Web-to-print européen limitera l'émission de CO2 et créera des emplois en France (32 en 2019).
Ludovic : Beaucoup d’imprimeurs en ligne semblent avoir redécouvert le marché des revendeurs : comme je m’en fais l’écho sur ce blog, au cours des derniers mois, plusieurs portails fermés ou offres spécifiques revendeurs sont apparues. Est-ce le signe selon toi de la bonne santé de ce marché, et surtout, de la nécessité de l’existence des professionnels des arts graphiques dans la chaîne de communication ?
Rafael : Le marché des "revendeurs" représente un volume élevé du Web-to-print. Il est important de différencier les imprimeurs en ligne ayant une "offre revendeur" et les imprimeurs en ligne "exclusivement dédiés aux revendeurs". Le marché des revendeurs est ultra exigeant (prix, délais, qualité des produits et services). Travailler uniquement avec les revendeurs ne se limite pas à mettre en place un portail spécifique. C'est tous les processus qui doivent être pensés et organisés pour le client "revendeur". Au niveau tarifaire, on voit apparaître sur certains portails des rabais "spécial revendeur ", de -10% à -20%. Je m'interroge sur la viabilité d'un revendeur travaillant avec ce niveau de marge. Chez Realisaprint.com, nous avons fait le choix d'être dédié aux revendeurs. Nous sommes le seul Web-to-print généraliste dédié à cette typologie de clients. Nous nous positionnons donc comme plateforme d'impression en laissant les professionnels des arts graphistes apporter leur conseil et leur créativité aux clients finaux.
Ludovic : Le Brexit, la montée des nationalismes, les tensions avec la Chine et les USA… penses-tu que le contexte mondial puisse influencer négativement ou positivement le marché de l’imprimerie en ligne en 2020 ?
Rafael : En période défavorable, la communication est un très bon moyen pour récupérer des parts de marché. Il y a donc de fortes chances que cette situation soit favorable au métier de la publicité et de la communication.
Ludovic : En conclusion, que puis-je te souhaiter à toi et tes équipes pour 2020 ?
Rafael : Nous pouvons espérer une année 2020 à la hauteur de 2019. C'est-à-dire : 16 nouvelles machines de production, 32 nouveaux emplois, 52% de commandes en plus !
Bonne année et meilleurs vœux Ludovic !